Bienvenue sur Dandelion

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Le blog estampillé Littérature 2.0

Chroniques littéraires et observateur de la dématérialisation du Livre

mardi 23 septembre 2014

Ça de Stephen King

Deux œuvres de Stephen King ont tendance à revenir souvent dans la bouche des aficionados du maître lorsque l'on évoque avec eux celles qui les ont le plus marquées : Le Fléau et Ça. Toutes deux publiés en langue original au tout début de sa carrière (1978 pour Le Fléau et 1986 pour Ça), ces deux blockbusters ont pour ma part été au moins rattrapé dans l'anthologie par le plus récent et magistral 22/11/63

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Pitchs de l'éditeur (Editions J'ai lu):

Tome 1:

La terreur s'incarna pour la première fois dans un bateau en papier journal dévalant un caniveau gonflé d'eau de pluie. Un petit garçon courait gaiement à côté. Il s'appelait George et avait six ans... Pris dans un tourbillon, l'esquif disparut dans une bouche d'égout. L'enfant mit un genou à terre, se pencha...

Des yeux jaunes le regardaient, des yeux comme ceux qu'il avait imaginés le guettant dans la cave... « Salut, Georgie ! » fit une voix... Un clown se dressait dans l'égout. Sa main noueuse comme une patte de rapace tenait un lot de ballons colorés... George tendit le bras... Dans la rue, les gens ne virent qu'un gamin en ciré jaune qui hurlait et se tordait dans le caniveau...
Oeil de salamandre, Queue de dragon, Main de gloire, quoi que ce fût, c'était là de nouveau... ÇA ! L'ordure aux cent têtes...

Tome 2:

Horreur et cataclysmes... Tous les vingt-sept ans le cycle reprend. A Derry, ville d'antiques perversions, la violence atteint alors des sommets de fureur. Jetés sur cette trajectoire infernale, sept mômes ont fait le serment de revenir si ÇA recommençait ! Paume contre paume, ils ont signé de leur sang leur promesse... Bill le Bègue, Richie la Grande Gueule, Ben, dit Meule de foin, Stan, Bev, rousse et belle en diable, et tout le club des ratés...

Qu'ont-ils vu, tous, qui aurait rendu un adulte fou ? Quelle chose innommable ? Obscurs souvenirs... Pour les uns momie aux yeux de goudron frais, pour les autres, oiseau-roc monstrueux, lépreux au nez amputé, loup-garou, vampire à la bouche hérissée de lames de rasoir... Tous avatars de Grippe-Sou, le Clown ! ÇA !
L'ennemi aux cent visages...

Tome 3:

Les souvenirs s'éloignent et s'éparpillent comme des cauchemars... Celui de Grippe-Sou, blême et ricanant ! Vingt-sept ans plus tard, le clown est toujours là, prêt à frapper, à réveiller les monstres d'autrefois et leurs danses macabres. A Derry, Bill et ses amis sont revenus, fidèles à leur serment. Mais croient-ils toujours à la magie qui, seule, rend la magie possible ? Sauront-ils imaginer le pieu ou le lance-chiques, capable de tuer l'Alien ?

Pour la seconde fois, ils plongent dans les trous de Morlock. Mortelle randonnée ! Dépouillé de ses masques et de ses colifichets, le clown attend, figé dans les lumières mortes. Dernière illusion ! Chute sans fin dans les rapides de l'effroi... ÇA est là ! Sphinx gluant gluant de pattes et de poils ! Œil hypnotique et reptilien ! Et qui n'a jamais eu peur de ÇA ! Le spectre de nos peurs ancestrales...

***
Stephen King a mis plus de 4 ans pour venir à bout de Ça (9 septembre 1981 au 28 décembre 1985). Une fois le dernier tome refermé, l'impression est qu'il n'y a vraiment rien d'étonnant. Car ce roman, estampillé Frisson/Horreur est bien plus que Ça. Se déroulant sur deux périodes, en 1957-58, pendant la jeunesse du Club des ratés "à l'époque où un enfant pouvait s'extasier pour un bateau en papier" dans laquelle Stephen King  réalise une chronique jubilatoire de la jeunesse en Amérique de la fin des années 1950 puis, à 27 ans d'intervalle (le temps d'hibernation de Ça), en 1985-86 alors que devenus adultes, Bill le Bègue, Richie la Grande Gueule, Eddie l'asthmatique, Ben dit Meule de foin, Stan le juif, Bev la rousse plantureuse  mais sans Stanley n'ayant pas supporté le retour de Grippe-Sous, affrontent pour la seconde fois cette entité maléfique, incarnation du mal absolu qui prend la forme des peurs les plus primaires de ces adversaires et dont seuls l'amitié et la perdurance de leur faculté à croire à l’inimaginable seront leur unique planche de salut, Ça est une brillante réussite du récit raconté sur le mode flash-back, Stephen King passant avec brio (une phrase débutant à la fin d'une époque pour s'achever dans l'autre) et sans la moindre impression de confusion de l'une à l'autre en y ajoutant même des interludes prenant la forme du journal d'un des membres du club, Mike Hanlon, devenu bibliothécaire, pour préciser certains éléments de son intrigue.

Du frisson, il y en a, oui. Mais au delà du summum de toute son oeuvre en la matière, d'un véritable inventaire de l'horreur sous toute ses formes, Stephen King comme à son accoutumé, brosse un portrait de son pays peu recommandable en abordant certains de ses thèmes de prédilection comme les moteurs de la création (Bill Denbrough le bègue est devenu en 1985-86 un écrivain célèbre) la violence enfantine (direct et physique pour la relation de Bev et de son père qui "se fait vraiment beaucoup de soucis pour elle" ou moins évidente chez la mère d'Eddie Kasprak, mère surprotectrice toxique) et la violence conjugale (Bev et son mari) ou le racisme (le récit de l’incendie du Black post) passant de monstres incarnés à d'autres moins visibles mais tous aussi pernicieux.


Beaucoup ont connu Ça grâce à son adaptation TV par Tommy Lee Walace "Il" est revenu diffusé dans les années 1990 sur la chaîne M6 dans une version édulcorée (de sa dimension sexuelle notamment) mais ô combien effrayante lorsque l'on est un préadolescent. Pilier de son oeuvre, Ça méritait sans doute mieux mieux qu"un simple téléfilm et c'est donc tout à fait logiquement que le pavé de Stephen King sera de nouveau adapté, pour le grand écran cette fois-ci, dans un double long métrage d'ores et déjà en préparation par le réalisateur de la série True detective, Kary Fukunaga. 

Ça va refaire parler de lui...

AL

Morceaux choisis:  

"A Derry, la faculté d'oublier les tragédies et les désastres confinait à l'art, comme Bill Denbrough allait le découvrir avec les années."

"Ouai, si on ne peut pas voir à travers le miroir actuellement, nous verrons comme si c'était une vitre après notre mort."

Interview-bilan de Francis Geffard l'organisateur en chef de l'édition 2014 du Festival America de Vincennes

L'interview de Francis Geffard effectué par Vincennes TV. Succès pour cette édition 2014 avec plus de 35000 visites:


Succès pour l'édition 2014 du Festival AMERICA... par vincennestv

jeudi 18 septembre 2014

Le Ciel nous appartient de Brendan I. Koerner

Quelle est la meilleure recette pour pondre un bon polar ?
Soit faire preuve d'inventivité et d'inspiration, soit comme l'a fait Brendan I. Koerner avec Le Ciel nous appartient en s'emparant d'une histoire vraie exceptionnelle.

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Journaliste américain à The Wired, ancien éditorialiste au New York Times et à Slate, Brendan I. Koerner s'était déjà fait remarqué avec Now The Hell Will Star non traduit en français et qui relatait la désertion après le meurtre d'un officier blanc d'Herman Perry, un soldat afro-américain affectée lors de la seconde guerre mondiale dans la zone Chine-Birmanie-Inde et dont les droits ont été acquis par Spike Lee en vue d'une adaptation.

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Second essai et second succès pour Brendan I. Koerner qui cette fois s'empare de l'un des détournements d'avions les plus mythiques de l'histoire de l'aviation américaine, celui réalisé par Roger Holder ancien soldat de la guerre du Vietnam et Katy Kerkow une séduisante jeune femme issue du Midwest américain et dont la rencontre, tels Bonnie et Clyde va bouleverser leur destiné, les conduisant de l'Algérie à la France où ils devinrent de véritables icônes révolutionnaires encensées par nombre d'artistes comme ceux de la Nouvelle Vague.          

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Au-delà, de ce destin d’exception, et c'est ce qui rend l'ouvrage de Brendan I. Koerner si atypique, nous est offert une véritable enquête historique des détournements d'avions américains (même si cela parait aberrant aujourd'hui, certaines années plus de cinquante d'entre eux ont pu avoir avoir lieu) avec de riches détails sur les motivations des différents protagonistes et sur la véritable bataille que ceux-ci créèrent entre politiques et lobbies des compagnies aériennes quant aux actions nécessaires -mais toujours trop coûteuse pour ces derniers - pour les limiter.

Chronique de l'Amérique déchirée sur fond de guerre du Vietnam, conflit diplomatique avec Cuba et mouvement Peace and Love, histoire d'amour improbable et acte de rébellion fondateur d'une destinée inimaginable, Le Ciel nous appartient est un vrai page turner plus à classer dans le récit journalistique que dans la fiction classique, ce qui n'enlève rien à ses qualités tant le travail de recherche de Brendan I. Koerner et les nombreuses références citées lui donnent du corps.

AL

Morceaux choisis:

"En régnant momentanément en maître suprême sur la frontière américaine la plus absolue, ces âmes déchues souhaitaient avant tout recouvrer une certaine dignité. Tant qu'ils pourraient embarquer armés de pistolets, de bombes ou de flacons d'acide cachés dans leurs bagages à main, les pirates de l'air seraient prêts à risquer leur vie de rebelle pour avoir la chance ultime d'en rectifier le cours."

"Aussi, les Américains les plus désespérés imaginèrent-ils d'autres mises en scène pour incarner les héros de leurs propres fictions de rédemption. Les années qui suivirent le Watergate et la chute de Saigon furent jalonnées de faits divers hauts en couleur, perpétrés par des hommes et des femmes au bord du gouffre : kidnappings, explosions de voitures, assassinats de politiciens et de célébrités."

"Hubbard suggérait également que le fait de pointer une arme sur une hôtesse "pourrait bien être le premier acte sexuellement agressif de leur vie"."

lundi 8 septembre 2014

Rentrée littéraire 2014: L'Audience d'Oriane Jeancourt Galignani

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En recevant, dans mon colis de la rentrée littéraire envoyé par Decitre, les épreuves du nouveau roman d'Oriane Jeancourt Galignani, L'audience je l'avais très vite estampillé comme l'un des probables buzz de septembre. Si sa sortie semble se faire beaucoup plus discrète que je ne l'avais présagé, gageons qu'il ressortira du lot dès que la digestion de ces nombreuses publications (607 romans) sera effective.

C'est qu'à l'instar de celui publié par Leila Slimani Dans le jardin de l'Ogre (voir la vidéo de l'auteure dans les liens à la fin de ce billet), le thème abordé dans le second roman d'Oriane Jeancourt Galignani, l'addiction sexuelle, est particulièrement sulfureux.

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Résumé de l'éditeur :

Dans une petite ville du Texas, une jeune enseignante, mère de trois enfants, attend en silence le verdict de son procès.
Qu’a-t-elle fait pour être traînée en justice, et risquer cinq ans de prison ferme ?
Elle a entretenu des rapports sexuels avec quatre de ses élèves, tous majeurs. Un crime passible d’emprisonnement au Texas, depuis 2003.
Mais pourquoi l’accusée, Deborah Aunus, s’obstine-t-elle à se taire ? Pourquoi son mari, combattant en Afghanistan, se montre-t-il si compréhensif ? Pourquoi les déclarations de sa mère l’accablent-elles ?

Au fil d’un récit implacable, écrit d’une pointe sèche et précise, Oriane Jeancourt Galignani tient le journal de cet ahurissant procès où la vie privée d’une femme est livrée en pâture à la vindicte populaire, et sa liberté sexuelle pointée comme l’ennemie d’une société ultra puritaine. Construit à partir d’un fait divers qui a bouleversé l’Amérique, ce huis-clos haletant donne lieu à un roman aussi cru que dérangeant.

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Après un premier roman (Mourir est un art, comme tout le reste) consacré à la poétesse américaine et grand symbole féministe Sylvia Plath, Oriane Jeancourt Galignani poursuit son cheminement en s'emparant de ce fait divers survenu au Texas et qui donna lieu à la condamnation pour 5 ans de prison de Brittni Colleps, une jeune professeur accusée d'avoir entretenu des relations sexuelles avec plusieurs de ses élèves pourtant consentants et majeurs. Mais les rapports avec l'affaire originelle s’arrête là puisque Oriane Jeancourt Galignani, au contraire d'effectuer une retranscription journalistique minutieuse, a préféré s'en détacher, ne cherchant pas à interroger Brittni Coleps ou les membres de sa famille pour rentrer dans une vrai démarche romanesque. Ainsi, Brittni Coleps devient Déborah Aunus.

D'une écriture au couteau, froide, plus explicative qu'analytique mais sans épargner aucuns détails en multipliant les scènes plus crues les unes que les autres au fur et à mesure que Déborah Aunus déborde toutes les limites d'un jeu sexuel qui va la perdre, Oriane Jeancourt Galignani si l'on on comprend très vite dans quel camp elle se place (de ceux qui ont dénoncé l'aberration de cette justice américaine prompt à envoyer une femme en prison en raison de ses choix sexuels contre ces hommes et femmes, instigatrice de la loi, procureure à l'affût de l'Affaire, jurés sous couvert d'ultra-puritanisme, juge pourtant corrompu par ses désirs, qui l'ont permise) ne juge jamais et laisse seul  au lecteur de choisir où se trouve la véritable obscénité. 
Oriane Jeancourt Galignani aurait fait une bien mauvaise avocate tant il est tentant de condamner cette professeure totalement pommée et son jusque boutisme charnel portant son désir au dessus de tout, sans effort d'explication ou tentative d'absolution. Mais elle est un écrivain de talent et dénombre avec habileté ces incongruités, ces petits rouages d'un moteur judiciaire qui, s'ils se mettent tous en branle peut envoyer en prison, dans une nation pourtant porte parole de la liberté, un individu pour ses préférences sexuelles.  
AL
"Difficile de comprendre ce qui les attire chez ces filles à qui elle n'est jamais parvenue à ressembler, ces filles qui s'octroient le luxe d'ignorer le désir qu'elles suscitent, comme s'il y avait une vie hors de hommes."
Liens:
http://www.transfuge.fr/interview-l-audience-oriane-jeancourt-galignani,236.html






7ème Edition du festival America de Vincennes

Se déroule ce weekend (11 au 14 septembre) à Vincennes, le 7ème festival consacré aux littératures et cultures d'Amérique du Nord. L'occasion de pouvoir y rencontrer parmi de nombreux auteurs français, haïtiens, canadiens et américains, deux auteurs dont les romans se sont particulièrement remarqués en cette rentrée littéraire : Nickolas Butler (Retour à Little Wing) et Philipp Meyer (Le Fils).

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D’AMÉRIQUE ET DE FRANCE

Longtemps la France a rêvé d’Amérique, et ce depuis les premiers voyages de Jacques Cartier dans les années 1530, jusqu’à donner naissance à cette Nouvelle-France qui, à la fin du XVIIe siècle, s’étendait d’un bout à l’autre du continent, d’est en ouest et du nord au sud, de la côte Atlantique aux Grandes Plaines, des rivages de Louisiane à l’immensité  des forêts canadiennes.

On oublie souvent combien la présence française a joué un rôle majeur dans le développement de l’Amérique telle que nous la connaissons aujourd’hui. Qu’ils aient été commerçants, militaires, missionnaires, trappeurs ou coureurs des bois, les Français ont exploré le continent, dessiné des cartes, fondé des villes, fait du négoce avec les tribus indiennes, baptisé rivières, lacs et montagnes... L’aventure s’est achevée en 1763 avec la perte du Canada puis en 1803 avec la cession de la Louisiane aux Etats-Unis mais, par leur présence, les Français ont donné naissance à une culture riche et plurielle, toujours vibrante, celle de l’Amérique francophone.

C’est cette Amérique que nous avons choisi de mettre à l’honneur en invitant écrivains et artistes venus du Québec, d’Haïti, d’Acadie, de Louisiane, du Manitoba et de la Saskatchewan. Car en plus d’une histoire et d’une culture, nous avons une langue en partage. Aussi avons-nous souhaité la présence d’écrivains français dans les débats et rencontres. Ils ont été nombreux à accepter notre invitation et nous les en remercions.

Nous sommes également heureux de pouvoir, une fois encore, célébrer la richesse et la diversité des littératures anglophones en accueillant des auteurs venus du Canada et des Etats-Unis. Deux pays auxquels les Français sont attachés, deux cultures avec lesquelles perdure cette relation entamée il y a plusieurs siècles.

Grâce à ces auteurs et à leurs lecteurs mais aussi aux éditeurs, traducteurs, journalistes, libraires et bibliothécaires rassemblés à Vincennes pendant quelques jours, cette septième édition d’America s’annonce exceptionnelle et nous souhaitons, une fois encore, que le livre et la littérature soient fêtés comme il se doit.

Francis Geffard et Pascal Thuot


vendredi 5 septembre 2014

Rentrée Littéraire: Orphelins de Dieu de Marc Biancarelli

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Faire partie de l'aventure de la rentrée littéraire implique, au-delà de pouvoir faire de magnifiques découvertes (Retour à Little Wing de Nickolas Butler, Le bonheur national brut de François Roux), de se retrouver avec entre les mains des livres qui n'auraient eu aucune chance de s'y trouver en temps normal. C'est le cas pour ma part d'Orphelins de Dieu de Marc Biancarelli, spécialiste de la langue corse qui, après plusieurs ouvrages écrits en langue corse dont le remarqué Murtoriu publié en 2009 et traduit par son ami Jérôme Ferrari en 2012 sous le tire Ballade des innocents, a rédigé ce dernier roman directement en français.

M'apparaissant d'un premier abord comme un OVNI littéraire, Orphelins de Dieu n'est finalement qu'une transposition du mythe du western dans la campagne corse de la fin 19ème siècle. Un histoire de vengeance. Celle de Vénérande une jeune fille vivant recluse avec son frère au milieu de la garrigue, qui pour assouvir sa soif de vendetta convainc Ange Colomba alias L'Infernu, ancien aventurier-mercenaire louant désormais ses services comme tueur à gages. Aussi téméraire que persuasive, Vénérande lui fait épouser sa cause et tous deux partent dans une traque sanguinaire à la poursuite des trois frères Santa Lucia, qui après avoir dérobé les porcs de la famille, ont sauvagement mutilé Charles-Marie ce frère, témoin du méfait, en le défigurant et lui tranchant la langue afin qu'il ne puisse les dénoncer.
C'est alors qu'au grès de leur chevauchée, Ange, à l'orée de sa vie, s'épanche et, dans un habile procédé narratif où, au milieu de leur progression, s’entremêlent en flash-back, les épisodes les plus marquants de son existence passée, de sa jeunesse à la décision fondatrice de refuser la circonscription bonapartiste, menant ensuite au milieu d'une bande de mercenaires les guerillas d'indépendance en Corse, en Italie et jusqu'en Grèce où la frontière entre patriotisme et brigandage est souvent bafouée. 

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D'une écriture transpirant son amour pour la Corse et d'où le lyrisme le dispute à la rudesse et la à plus grande cruauté, évitant par bonheur les longueurs, écueils dans le lesquels il aurait été si facile de tomber, Marc Biancarelli nous emporte dans cette quête épique jusqu'au face à face à final, digne -oui c'est bien cela- des plus grands westerns hollywoodiens.

Tiens, je me ferai bien un petit Sergio Leone moi ce soir...      

AL

Morceaux choisis:

"- Laisse tomber. Je pense que tu es complètement folle. Comme les folles sont plus ou moins sacrées, je t'épargne. Et je te violerai une autre foi. De toute façon, avec tes obsessions homicides, ça m'étonnerait que tu perdes ton temps à me balancer. Maintenant laisse moi partir.
- Mes quoi?
- Tu te feras expliquer ça par quelqu'un d'autre. En plus tu es ignorante. Sans compter que tu n'es pas jolie, mais le plus gros défaut c'est quand même ton ignorance."

 "Dans sa jeunesse, Ange Colomba avait donc fait couler beaucoup de sang, et parfois, aussi, coupé des têtes. Lorsque cela s'était avéré judicieux,, ou qu'il l'avait imaginé de la sorte. Evoquer son nom, c'était évoquer un diable en action, c'était appeler sur soi le mal absolu. Alors ainsi l'appelait-on L'Infernu, l'Enfer, et ce triste anthroponymie avait depuis bien longtemps enfoui dans la plus grande insignifiance sa véritable identité. Sans doute dans une autre vie, avait-il été l'un des plus jeunes contumaces à accompagner les bandes funestes qui avaient désolé le pays, mais le temps des rébellions était passé, et comme nombre de rebelles qui se retrouvent sans solde un beau matin, L'Infernu n'avait dû qu'à sa reconversion comme tueurs à gages de pouvoir encore alimenter les abjectes et innombrables chroniques funéraires."

"Faustin hurla comme une bête lorsqu'il vit le couteau, puis encore plus fort lorsqu'il sent qu'on lui rabotait les oreilles. Mais étonnamment la douleur était moins grande que la peur. L'Infernu avait agi vite, de manière cruelle, certes, mais somme toute assez généreuse, sans s'attarder sur la découpe, tranchant dans le vif plutôt que cisaillant, et de plus il avait une bonne lame, affûté à merveille, pas un outil qui accroche, ou une ripe, et à ce moment-là c'était appréciable. Le sang chaud coulait maintenant des deux côtés de la tête de Faustin le Rat, et il ne criait plus, parce que l'Infernu lui écrasait la bouche d'une main, et lui visait l’œil avec la pointe du couteau de l'autre."