Bienvenue sur Dandelion

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Le blog estampillé Littérature 2.0

Chroniques littéraires et observateur de la dématérialisation du Livre

samedi 20 avril 2013

Monsieur Le Commandant de Romain Slocombe


Certains se diront que j'arrive après la guerre...
Sans doute, car le buzz autour de Monsieur le Commandant est passé. Mais je répondrais à cela qu'il n'est jamais trop tard pour parler d'un bon livre. Et quel livre !

http://blowawaydandelion.blogspot.fr/

Tout a commencé il de cela un an et demi. Publié initialement par les modestes éditions NIL, dans la collection "Les Affranchis" (qui propose à des auteurs de rédiger la lettre qu'ils n'ont jamais osé écrire) Monsieur le Commandant, qui aurait dû passer inaperçu au travers de la rentré littéraire est pourtant retenu (merci Tahar Ben Jelloun voir l'explication dans la vidéo)  dans la première liste de sélection pour le prix Goncourt 2011. Les éditions NIL ne faisant pas partie des mastodontes de l'édition française, celui-ci fut remporté par Alexis Jenni pour L'art français de la guerre.

Tout aurait pu s’arrêter là.

Mais la qualité de l'écriture de Romain Slocombe retient tout de même l'attention de François Busnel, animateur de La Grande Librairie sur France 5 qui reçu l'auteur le 23 novembre 2011 dans une émission dont les thèmes tournaient autour de la question juive et de l'antisémitisme et donc l'interview fut particulièrement élogieuse.

http://blowawaydandelion.blogspot.fr/

De bouche à oreille, la renommé du roman fit ensuite son petit bonhomme de chemin début 2012, relayé après Busnel par Franz Olivier Giesbert, ce qui valut un autre plateau de télévision à Romain Slocombe, celui de l'émission de Laurent Ruquier, On n'est pas Couché. Sa notoriété était faite.

Alors décidément trop tard pour parler de ce roman aujourd'hui ?
Et décidément non pour la raison que j'évoquais plus haut mais d'autant plus que celui-ci n'a pas encore débuté sa seconde jeunesse puisqu'il n'a pas encore été édité en poche (qui engendre naturellement un second pic de vente) ce qui est prévu pour le 6 juin 2013. 

Les plus observateurs d'entre vous auront remarqué que j'ai écrit roman en italique. 
Oui, car lorsque que l'on aborde le livre de Romain Slocombe, tout donne l'impression de tenir entre les mains autre chose que cela. Le manuscrit, nous explique une note de l'éditeur en préambule, est en faite la retranscription d'une lettre retrouvée par hasard, en 2006, par un documentariste allemand, parmi des papiers de famille abandonnés dans une décharge de Leipzig. Bien évidement et pour des raisons compréhensibles, les noms de l'auteur de la lettre et de certains protagonistes ainsi que le lieu principal ou l'action se situe, ont été modifiés.
Cette lettre, nous le comprenons assez rapidement dès les premières pages, est en fait une lettre de dénonciation. Elle est écrite pendant la seconde guerre mondiale par Paul-Jean Husson, un écrivain et académicien, membre de l'académie Goncourt, pétainiste et viscéralement antisémite. Jusque là, rien de très étonnant me direz vous ? Soit. On dénombra après la guerre, environ 7 millions de missives de ce type, pour la plupart envoyées anonymement par des français pour dénoncer un voisin au comportement un peu louche.

Sauf que Jean Paul Husson dénonce ici, sa belle fille, mère de ses deux petits enfants et dont il tombera tout d'abord, follement amoureux. Sauf, que Ilse s’avère être... juive. Mais j'en ai déjà trop dit même si tout cela est décrit dans la quatrième de couverture. J'ai souvent pour habitude, une fois que j'ai jeté mon dévolu sur un livre, d'en savoir le moins possible sur lui avant de l'aborder. Ainsi, j'évite autant que faire se peut de parcourir cette fameuse quatrième de couverture souvent si mal conçue, qu'elle dévoile une part importante de l'intrigue d'un roman (le problème se pose moins pour d'autre forme de littérature) et de fait, retire un plaisir certain à la découverte des premières pages. Je n'ai pas perdu cette habitude pour Monsieur le Commandant. Et je fus donc happé comme beaucoup d'autres lecteurs, par les premières lignes, qui tout en me doutant bien où tout cela allait me mener, me poussa irrémédiablement de la quiétude d'un village de Normandie entre deux-guerres, au plus innommable des crimes.

Au delà de la valeur certaine de l'écriture de Romain Slocombe, de son érudition et de se sa capacité à donner à son récit une réelle impression de vérité, accentuant d'autant plus son coté tragique, ce livre nous rappelle également qu'une certaine partie de la grande bourgeoisie française, accueillie Hitler à bras ouvert, et que l'horreur de l'idéologie nazie n'as pu s'imposer auprès d'une partie de la population française qu'au pris du relais de toute une partie de l'intelligentsia française de l'époque, peintres, écrivains, journalistes et leaders d'opinions en tous genres. Ces derniers, qui finirent par nuancer peu à peu leur discours au fur et à mesure que l'aura de l'Allemagne se faisait moins étincelante. Ceux-là furent appelés après la guerre, les Girouettes.

Pour étayer cette idée et à titre de conclusion je vous propose un court passage d'un des documents additionnels du livre (pourtant bel et bien fictif et également rédigé par Romain Slocombe) qui renforce encore ce sentiment de tenir entre les mains un témoignage authentique, une interview de François Lefèvre, un ancien résistant F.TP.:

Attendez, attendez: je vais vous dire encore une chose. Y avait pas que la Gestapo ! Moi, je considère, personnellement, que des chroniqueurs de radio, des orateurs, des journalistes, des hommes politiques furent infiniment plus criminels que les pires ordures de la Gestapo. Certains discours, certains écrits, une certain climat et la propagande "européenne" ont entraîné dans le sillage mortel de la police allemande des hommes et des femmes dont le seul tort a été de gober ce qu'ils entendaient et lisaient. Malheureusement, les cours de justice et les tribunaux ont adopté d'autres critères. On a fusillé des tortionnaires et des tueurs, mais ceux qui les ont incités à le devenir n'ont eu en général à répondre que d'un simple délit d'opinion. Je considère cela comme un véritable scandale.

AL

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